Les ateliers sont des événements qui ont pour objectif de construire des idées « en commun ». Les participants et le designer vont chercher à parcourir les étapes du design de service afin de réaliser leur projet : découvrir, définir, développer et expérimenter. Un atelier peut aussi être focalisé sur une de ces étapes en particulier. Le but d'un atelier peut-être de s'immerger dans un contexte afin de découvrir les problèmes à régler, de définir des solutions avec le public concerné, de développer un prototype pour matérialiser un travail collectif ou de proposer aux usagers d'expérimenter des solutions par le biais de prototypes.
Dans un atelier, le travail du designer repose sur la création des conditions pour générer de la créativité. L'atelier est un outil par lequel le designer peut réussir à faire surgir des liens, à dégager des tendances, à trouver des convergences et des frictions.
L'atelier est en fait un moyen pour le designer d'entrer en contact avec les usagers concernés et de co-construire avec eux des ressources pour développer son projet. C'est un moyen d'innover sur les processus de travail, en créant des espaces-temps propices à l’imaginaire, à l’inattendu et à la spontanéité.
Cela passe souvent par la production d'outils de captation, de réflexion, de productions techniques, et de tests utilisateur. Par ces outils, le designer va chercher à créer de nouveaux filtres de lecture et bousculer les modes de pensée des participants. C'est en fait un moyen de redéfinir les problèmes par de nouvelles relations et de nouveaux modes d'actions lors de l'atelier.
Par exemple, le manager d'un service nous a contacté afin d’organiser une journée de créativité dans le but d’améliorer les conditions de travail de ses agents. La configuration des problèmes énoncés portait sur un manque de convivialité et d’échanges au sein de leur open-space. Mon outil, pour définir des solutions avec le public concerné fut de proposer aux participants de se retrouver sur leur lieu de travail avec un plan des lieux afin de redéfinir l'organisation de leur espace de travail.
Le temps consacré à l'atelier est un moyen de faire émerger des connaissances sur un sujet. Le rôle d’un designer est alors de capitaliser par des textes et des représentations visuelles les ressources qui se dégagent de ces temps.
Ce que le designer recherche sont des connaissances sur les besoins des usagers, sur les idées des usagers pour reformuler les problèmes posés, ou encore des connaissances sur l’impact d’une idée prototypée. Ces connaissances forment ainsi les ressources manipulables pour mener un projet. L'atelier n'est donc pas une fin en soi, mais un outil de travail.
Le travail du designer au sein de ces temps de créativité est davantage de l'ordre de l’ajustement que de la conception d'un dispositif « innovant ». Par le biais d'ateliers, le designer cherche de manière itérative à résoudre collectivement un problème. Par exemple, le CERT (centre d’Expertise et de Ressources des Titres) qui traite les demandes concernant des titres d’identité ( cartes grises, passeports ...) de manière dématérialisées a fait appel à nous pour développer des pistes de solution lors d'une journée de Créativité. Depuis 2017, les guichets physiques en préfecture ont fermé, les démarches s’effectuent en ligne. Certains citoyens ont du mal à s'adapter à ce changement.
J’ai accompagné un groupe pour travailler sur l'accès des citoyens aux informations sur le fonctionnement des démarches de demande de titre. Par un parcours utilisateur, nous avons tout d’abord décortiqué les points de contacts entre les usagers et le dispositif d’information. Le premier point de rupture sur lequel les participants avaient la possibilité d'agir était le site internet de la préfecture (http://www.rhone.gouv.fr).
Après avoir sélectionné la démarche administrative recherchée, l’utilisateur de l’interface était dirigé sur une page avec une diversité d’informations et d’hyperliens. Nous avons modifié les interfaces des onglets « Informations générales sur le permis de conduire » et « Liste des communes du département du Rhône équipées pour le dépôt des demandes de cartes nationales d’identité et de passeports » avec une nouvelle architecture de l'information.
Plutôt que de réfléchir à de nouvelles manière de communiquer, nous avons seulement ajusté ce qui était possible d'être modifié par les agents présents dans l'atelier. Ce travail ne peut s'arrêter là, mais les ressources créées nous permettent de comprendre que le site internet de la préfecture est l'élément sur lequel il faut travailler avec comme piste, la modification de son architecture d'information.
Ce qui reste aussi de ces journées, mais qui n'est pas quantifiable est l’expérience des participants. En participant au processus de création, les personnes modifient leurs manières de faire et leurs visions des choses. En travaillant avec des agents de l’action publique, j'ai vu leurs rapports aux citoyens, leurs méthodes d’analyse, leurs manières de travailler collectivement, leurs manières de mettre en place des solutions évoluer... Ces évolutions ont autant une valeur innovante et transitionnelle que la solution elle-même.