Les agents des institutions publiques produisent principalement des idées destinées à résoudre les problèmes rencontrés sur les territoires. Ces agents produisent un travail de réflexion et peuvent avoir du mal à mettre en pratique leurs idées. Le fonctionnement des politiques publiques françaises et les pratiques des agents publiques semblent s'écarter de la réalité du terrain.
Lors de mon expérience au Secrétaire général aux affaires régionales, je me suis aperçu que les politiques publiques se décident de manière descendante et plus on descend dans les cercles de décision, moins il est possible d'être libre de ses actes. En collaborant avec des étudiants de Science Po Lyon, j'ai vu que leur formation proposait des cours principalement théoriques leur permettant de se former aux pratiques institutionnelles. Ces pratiques sont nécessaires, mais manquent d'ouvertures sur d'autres manières de penser.( rapport d'analyse, compte-rendu d'action) Ces apprentissages semblent enfermer les étudiants dans une vision de l'action publique cloisonnée par des pratiques administratives trop conceptuelles et éloignées des réalités humaines. Cette formation semble écarter les pratiques des réalités du terrain et mal répondre aux besoins des citoyens.
Je pense que pour construire un projet sur un territoire, il faut le construire avec ceux et celles qui l'habitent. Et cela passe par de "nouveaux" modes d'actions démocratiques en créant de nouvelles pratiques des politiques publiques. Certains professionnels de l'action publique cherchent à modifier ces modes de penser en expérimentant de nouveaux modes d'action publique impliquant davantage les citoyens dans la décision du devenir de la société. C'est le cas de La Public Factory ; une plateforme de la Fabrique de l’innovation (université de Lyon) qui vise à former les étudiants aux enjeux concrets de la transformation de l’action publique en permettant aux élèves d’expérimenter d’autres modes d’action publique par le design. Pour ces acteurs, il s’agit de tester différentes méthodes de réalisation de l’action publique en mobilisant l’ensemble des parties prenantes tout le long du processus de constitution de la politique publique. En accentuant le regard porté sur les usages et les usagers ou en expérimentant de nouvelles méthodes de conception créative des politiques publiques.
Le designer peut alors chercher à construire des outils démocratiques pour renouer ce lien entre agent public et citoyen : se connecter avec le terrain par des outils ethnographiques, co-décider des choix politiques avec les citoyens par des supports pour accueillir leurs réflexions. Créer des lieux de dialogues et de co-construction où il est possible de rendre opérationnelles les idées des habitants.
Ces outils peuvent repondre à plusieurs objectifs comme de créer des espaces de co-décision, de créer des relations entres des individus qui n’ont pas l’habitude de travailler ensemble ou encore de donner l’opportunité de co-construire l'avenir de la société. Les politiques publiques ont besoin de développer des moyens démocratiques pour faire évoluer leur pratique vers une mise en commun plus concrète de la décision. Au-lieu de produire pour, il faut produire avec.
J'ai par exemple proposé un dispositif qui se présente comme une interface de dialogue effaçable où les pouvoirs publics pouvait venir poser une question aux citoyens sur l'avenir d'un projet urbain. Ce dispositif cherchait à questionner la possibilité de créer des espaces démocratiques en transformant des lieux de transition, d'attente. C’est pourquoi le tableau citoyen est inséré dans un arrêt de bus(espace latent). J'ai cherché à modifier sa fonction d'attente en une fonction d’expression démocratique pour décider de l'avenir du quartier dans lequel il est implanté.